Comment raconter ces douze journées-nuits ?
Imaginez un shaker, voyez, le truc pour mélanger les alcools ; ben, voilà, c'est la première image qui me vient ...
Parce qu'après tout, que ce soit penché, pffou ! on s'en fout ! Surtout qu'on est resté sur le même bord pendant 7 jours, on s'habitue ! Mais se faire valdinguer, cogner, éjecter, passer son temps à s'agripper, se tenir et se retenir... je ne vois pas où est le plaisir, faudra que vous m'expliquiez ça, les voileux …
Tu te retrouves enfermé dans un espace petit, avec un plancher à 45°, dans lequel tu t'accroches à tous les éléments ; dehors, pratiquement impossible de circuler, et vagues qui t'aspergent complet toutes les 5 minutes, et qui font mine de t'embarquer !
Rien que sortir la tête en haut des escaliers (pour vérifier voiles, instruments et horizon, et ceci, toutes les 30 mn), c'est toute une expédition : enfiler son ciré, les fesses en appui sur la table, les 2 jambes écartées avec une main qui tient la cloison, puis jeter le corps en avant pour que les mains tentent de chopper les montants de l'escalier, puis grimper en crabe les pieds calés dans les angles avec les mains qui te hissent par le haut et la tête qui se contorsionne pour passer sous le panneau coulissant, puis poser les coudes, s'appuyer dessus pour assoir les fesses sur la dernière marche et extraire le haut du corps à l'extérieur en priant pour qu'il n'y ait pas de vague juste à ce moment là …
Bon, je ne vais pas vous le refaire, mais c'est le même genre pour aller aux wc, car pas question d'aller dehors !
Idem, oubliée notre jolie cabine avec oreillers et couette, on dort chacun son tour sur la banquette du carré, c'est à peine si on enlève le ciré !
À force d'être bousculé et malmené en tous sens, c'est si fatigant que finalement, le mieux est de rester couché le plus souvent possible ! (on épuise notre stock de lectures ...)
Bon, j'exagère, il y a tout de même tous les jours un répit : à 11h30, la sacro-sainte météo marine sur RFI qui nécessite une mise à la cap (génois installé à l'envers et gv larguée pour tenter de ralentir et de mettre à plat), un arrêt total de tout instrument électrique (frigo, pilote, éolienne …) sinon ça scrouitche et on comprend pas la dame. Donc jm passe à la barre, et en profite d'ailleurs pour jeter ses lignes de pêche, moi j'enregistre, et pendant qu'il réécoute, dessine et réfléchit aux évolutions, je prépare des choses à manger, très rudimentaires (riz, semoule, pâtes ou lentilles).
Ça vous réjouirait, vous, comme programme ?
C'est un peu noir ce que je raconte, il y en a eu des « si j'avais su, j'aurai pas v'nu » ...mais il faut se rappeler que je suis partie avec ma ceinture lombaire encore bien nécessaire, donc pas très souple la dame pour jouer au shaker, et il faut savoir que dès les premiers jours, j'ai fait moi aussi ma crise de palud au milieu de tout ça ! Fièvre, maux de tête et vertiges qui se rajoutent … stop !
Comment a fait mon caton pour assurer tout ça ? Aujourd'hui, je me l'demande …
Ce qui l'a désappointé, lui, c'est qu'on n'a pas eu l'évolution météo qu'il espérait pour les derniers jours, c'est qu'il n'a pêché aucun poisson, c'est qu'on n'a vu aucun dauphin, ni baleine, ni oiseaux …
Tous seuls, avec du vent, des vagues et du près …
ha, si, quand même, il faut dire merci aussi à Monsieur Pilote ! Car je n'ose imaginer la même situation sans lui …
« Terre ! » (dans ces moments-là, tu comprends mieux Christophe Colomb ...)
Comme d'habitude, on arrive trop tôt en vue de la Gomera le dimanche 23 mai, on zigue et zague devant pour repérer la petite crique salvatrice qui va accueillir notre repos bien mérité : la cala Negra. …
Bon repos à vous deux. Après le shaker que du bonheur.
RépondreSupprimerisa
Pour enfiler sa culotte de ciré dans ce cas là, il y a aussi le cul dans l'évier le temps de passer les deux jambes ... Essaies et dit-moi ce que tu en penses.
RépondreSupprimer(Ne pas oublier de débarrasser la vaisselle sale avant ...)